17 mars 1975
A bâtons rompus avec Roland Besancet, président du Groupement Romand d'Informatique
01 Informatique No. 326
01: M. Besancet, vous êtes président du Groupement Romand de l’informatique depuis sa création, en juin 1971. Comment avez-vous été amené à prendre cette responsabilité?
Roland Besancet: J’étais, à l’époque, chef du service organisation générale chez Paillard et à ce titre chargé de préparer toutes les décisions, en matière informatique, de la société Yverdonoise. Dans le cadre de mes fonctions, j’ai eu l’occasion de nouer des contacts avec les responsables des entreprises romandes les plus avancées en informatique, Nestlé, Charles Veillon , Publicitas, Sodéco, etc. Nous formions un cercle tout à fait « informel » et au cours de nos rencontres, échangions des informations variées sur les problèmes de gestion de centres de calcul, de salaires, etc. Petit à petit, la nécessité nous est apparue d’élargir ce cercle, de l’ouvrir à tous les utilisateurs d’informatique et tout de suite à l’échelle romande. Mais, pour cela, nous avons adopté une attitude très pragmatique, en noyautant d’abord, par petits groupes d’intéressés à l’échelon local, Neuchâtel, Lausanne, Fribourg, dès 1970. En juin 1971, dès l’Assemblée Constitutive, nous obtenions le patronage de la Chambre Vaudoise du Commerce et de l’Industrie. C’était une très grande garantie du sérieux de nos activités. D’une poignée à la création, nous sommes passés à soixante-douze membres aujourd’hui.
01: Quelle est la philosophie du GRI en matière de nouveaux adhérents?
RB : Les utilisateurs ne savent pas assez que le GRI, c’est l’auberge espagnole. Notre action, en fait, s’oriente dans une double direction: d’une part les entreprises qui abordent seulement maintenant l’informatique, avec toutes les difficultés que cela implique, d’autre part et à l’opposé, les entreprises pilotes qui possèdent déjà une grande expérience dans ce domaine. Ceci peut paraître contradictoire mais c’est dans l’ordre des choses. Au GRI, il y a les preneurs et il y a les donneurs.
01: Comment arrivez-vous à concilier les deux?
RB: En motivant les uns et les autres. Nous avons entrepris, pour le premier groupe, une action de sensibilisation à l’informatique qui, je l’espère, sera fructueuse. Un cycle de trois séances d’information sur le thème « l’informatique dans les PME » lui était particulièrement destiné. Chaque participant a rempli, au cours de ces séances, dont la dernière a eu lieu le 6 mars, un questionnaire destiné à nous faire mieux cerner les problèmes de ces entreprises et ce qu’elles attendent de nous. Nous organisons, également, en avril-mai, un cours pour correspondant informatique.
01: Qu’entendez-vous par « correspondant informatique? »
RB: Le correspondant informatique est le trait d’union entre le service informatique et le service utilisateur. Il joue un rôle déterminant dans l’élaboration, la mise en place et la maintenance d’applications informatiques et formule à l’égard du service informatique les désirs et les besoins de son département.
01: Si vous contentez ainsi certainement, une grande partie de vos adhérents, votre action n_est-elle pas plus difficile auprès des entreprises pilotes les donneurs, pour reprendre vos propres termes ?
RB: Certainement. C’est pourquoi nous cherchons à les attirer en animant un groupe d’échanges sur les problèmes de banques de données auxquels sont confrontées toutes ces grandes entreprises, Bobst, Givaudan, Nestlé, Publicitas, Charles Veillon. Certaines d’entre elles, comme Nestlé, font déjà partie du GRI où elles sont très actives et nous ne désespérons pas d’enregistrer bientôt la participation des autres. Le groupe ASUAG à Bienne qui est le premier groupe horloger de Suisse ne vient-il pas de se joindre à nous?
Je suis personnellement membre de la société américaine SMIS, the Society for Management Information Systems. Je souhaite que dans un avenir proche, un groupe d’études du GRI soit assez avancé pour entretenir avec cette société des échanges fructueux.
01: Et sur le plan géographique, êtes-vous vraiment « romands » et représentés dans tous les cantons de langue française?
RB: Oui, mais de manière inégale. Notre audience doit s’élargir à Genève, au Valais, dans le Jura bernois. Notre méthode sera calquée sur les actions entreprises à la naissance d du GRI. Des membres actifs du GRI susciteront l’intérêt de nouveaux groupes dans les localités. J’anime moi-même un de ces groupes à la Chaux-de-Fonds.
01: Et sur le plan national? Quels sont vos rapports avec votre homologue de Suisse alémanique, la SVD (Schweizerische Vereinigung für Datenverarbeitung)?
RB: La SVD a rang d’ancienneté. Créée en 1968. elle a dépassé aujourd’hui le cap des cent membres. Les Tessinois lui sont rattachés. Nous travaillons ensemble à harmoniser nos structures, car nos objectifs sont identiques. Nous échangeons des informations, notamment en matière de formation. Comme vous le savez, une maîtrise d’informatique vient d’être instituée sur le plan fédéral.
Plusieurs organismes, comme l’IDV et le SIB (Schweizerisches Institut für Betriebsökonomie) ont déjà mis sur pied un enseignement destiné à préparer ce diplôme, en Suisse alémanique. Notre rôle sera de coordonner cette formation auprès des organismes romands correspondants, comme la COREDE et l’ADOST. Je suis d’ailleurs moi-même membre de la commission « Formation » de l’ADOST.
Il n’est, bien sûr, pas exclu que le GRI organise lui-même certains modules de formation.
01: A ce sujet, vous faites souvent appel aux sociétés de service pour l’animation de vos séances d’information ou de formation. Pensez-vous qu’elles ont un rôle à jouer dans le développement de l’informatique en Suisse?
RB: Il est capital, à plusieurs titres. Les SCI disposent de connaissances spécialisées et de sources d’information qui font défaut à la majeure partie des entreprises. Celles-ci sont cloisonnées dans leurs structures, dans leurs habitudes. Le rôle d’innovation des SCI est essentiel: elles développent de nouveaux outils, de nouvelles applications qui accélèrent l’évolution des entreprises.
De plus, nous sommes, en Suisse, dans un marché où il y a un net suréquipement en ordinateurs. Les SCI peuvent être utiles en apportant des solutions pour rentabiliser efficacement les équipements existants et freiner éventuellement des achats inutiles.
01: Dans ce domaine, leur intervention sera de plus en plus appréciable dans la mesure où déjà en Suisse, on observe un certain ralentissement de l’activité économique.
RB: Il ne faut pas encore « peindre le Diable sur la muraille »! Certains secteurs ont, il est vrai, des difficultés comme le bâtiment et l’industrie horlogère. Néanmoins, dans les autres domaines, ce n’est pas encore très perceptible. Mais, vous me donnez une idée, en effectuant des sondages auprès des responsables de l’informatique quant à leurs projets d’investissements, le GRI pourrait devenir un « thermomètre » de la conjoncture informatique.
Propos recueillis par Marielle Stamm